Le germe de la liberté
![]() |
Jordi Cuixart et Jordi Sanchez |
Article
co-écrit par Jordi Cuixart et Jordi Sànchez, pour le deuxième
anniversaire du « Premier Octobre 30.09.2019 21:00
Le
Premier Octobre a mis en évidence que rien ne peut arrêter la
volonté de la citoyenneté quand elle agit de façon coordonnée
pour défendre un objectif commun. Nous voulions voter et nous avons
voté. L’État espagnol, malgré sa grande capacité de menace et
de violence policière, n’a pas pu empêcher que plus de 2.300.00
femmes et hommes déposent leur bulletin de vote dans environ 6.000
urnes réparties dans presque 2.000 bureaux de vote ouverts en
Catalogne.
Des
nombreux éloges faits sur le référendum, le plus remarquable,
c’est la capacité de la société à désobéir pacifiquement à
une interdiction injuste et injustifiée. Le référendum, comme nous
l’avons rappelé aux magistrats du Tribunal Suprême, fut l’action
de désobéissance civile la plus importante que l’Europe ait
jamais connue ; ‘le moment gandhien de la Catalogne’, tel
que l’a décrit Ramin Jahanbegloo, directeur du Centre Mahatma
Gandhi.
Face
à la désobéissance civile massive, l’État a choisi la violence
et a refusé la politique du dialogue et de l’accord; une violence
qui est allée en croissant depuis l’automne 2017.
VIOLENCE
furent les matraques et aussi notre détention provisoire ;
VIOLENCE sont les accusations de rébellion et de sédition qui ont
mené la majorité des membres du gouvernement légitime et la
présidente du parlement en prison ou à l’exil et pour qui des
dizaines d’années d’incarcération sont requises ; VIOLENCE
sont les centaines de personnes mises en examen en punition de l’1O ;
VIOLENCE sont les tentatives désespérées d’entremêler
terrorisme et indépendantisme à quelques jours de la sentence du
Tribunal Suprême. VIOLENCE est la volonté de créer de nouvelles
affaires judiciaires à coup de détentions spectaculaires et de
fuites fausses et intéressées pour bâtir un récit qui criminalise
les détenus et le mouvement indépendantiste en général.
Depuis
la prison, nous partageons l’indignation concernant ces faits, nous
les souffrons à la première personne et nous savons l’inquiétude
croissante des citoyens face au rôle sale que l’État nous impose.
Nous vous encourageons à ne pas vous résigner, à continuer
d’exiger ce que nous considérons comme juste, et surtout, à
maintenir bien vive la flamme de toutes nos légitimes aspirations
nationales et démocratiques. Ne nous résignons pas et ne renonçons
à aucune d’entre elles. Continuons avec détermination à croire
au futur lumineux et possible qu’on veut nous nier.
Nous
vous encourageons, comme tant de fois nous l’avions fait avant
notre emprisonnement le 16 octobre 2017, à sortir de nouveau dans la
rue quand vous serez convoqués par nos entités et surtout, à ne
pas vous laisser emporter par la rage du moment. Le présent est dur,
et il est probable que les sentences et les prochaines décisions de
justice et de police le rendront encore plus amer. Mais le futur ne
pourra continuer à être nôtre que si nous sommes capables de
maintenir vif le germe de la non-violence.
Apprenons
les leçons du 1er et du 3 octobre 2017 pour répondre aux défis à
venir. Démontrons que nous combattons l’injustice et la violence
de l’État depuis la non-violence. Ce n’est qu’ainsi que nous
réduirons en miettes leur récit falsifié et que nous pourrons, à
nouveau, vaincre leur violence, démasquer leurs mensonges.
Nous
n’avons aucun problème pour dénoncer une millième fois la
violence et pour défendre que le seul chemin que l’indépendantisme
peut emprunter, est celui de la non-violence. Mais nous n’acceptons
aucune leçon de la part de ceux qui protègent la violence au sein
de l’Etat, de ceux qui nient à tous les indépendantistes, nous y
compris , le droit à la présomption d’innocence, et encore moins
de ceux qui, sans scrupule ni morale, manipulent des images et des
victimes du terrorisme vieilles de presque 30 ans pour se faire une
place dans la lutte électorale.
La
seule violence que nous ayons subie en Catalogne depuis 2017, c’est
celle que protège et que promeut l’État. Revendiquer la liberté,
manifester contre des décision politiques et judiciaires, exiger
l’autodétermination, désobéir à des lois injustes, des
interdictions arbitraires, dénoncer les montages policiers, défendre
les urnes ou voter lors d’un référendum n’est pas violent. Pas
de confusions.
Le
premier octobre 2017, nous avons appris jusqu’à quel point la
pratique de la non-violence est puissante. Grâce à la non-violence,
nous avons fait plier la décision de tout un État qui nous avait
interdit de voter et par-dessus tout nous avons réduit à néant les
efforts de l’État et de ses porte-voix médiatiques d’associer
la violence avec la défense du droit d’autodétermination et avec
le processus indépendantiste.
La
non-violence est la clé de voute qui soutient notre cause, qui n’est
rien d’autre que celle de la liberté et de la démocratie ;
Elle n’est ni synonyme de passivité, ni de renonciation, ni
d’inactivité. Il n’y a rien qui mette autant à nu la violence
de l’État qu’une attitude aussi déterminée, masive et
imaginative que pacifique. La non-violence est le germe d’un
processus qui, si nous continuons à le développer ensemble, sans
renoncements et sans peur, nous donnera, tôt ou tard, le fruit
espéré de la liberté. Merci de votre présence et de ne pas
faiblir.
Jordi
Cuixart et Jordi Sànchez
Prison
des Lledoners, premier octubre 2019
Source :
Commentaires
Enregistrer un commentaire